Le ciel était sombre, morne et gris. Les gens affluaient par vagues, se confondant et se ressemblant toujours. Visages éteints pour la plupart, à l'image de cet endroit, vide de sens. Oui, c'était plutôt morbide comme paysage, et pourtant... Je m'y étais habitué, et étais même las d'observer chaque jour le même paysage, théâtre quotidien de la vie. Ou plutôt, de la vie après la mort. Les âmes erraient, heureuses ou malheureuses, chacune avec sa dose de soucis quotidiens. Certains travaillaient en bon citoyen, si on pouvait encore dire ça tandis que d'autres se perdaient dans les méandres de l'oubli, et devenaient fous. Étais-je de ceux qui avaient su rester saints ? Je l'espérerais. Mais je n'en étais pas sur, les Limbes n'étant pas un univers réellement favorable aux sentiments positifs. 

Depuis mon arrivé, j'avais été assigné à cet tour de cristal, amenant chaque jour différentes âmes en son sein. Je me devais de la garder, de la protéger. Pourquoi ? Je ne le savais vraiment moi-même. Tout ce que je savais, c'était que sa lumière nous était vitale. Qui aurait été assez fou pour s'en prendre à elle ? Ça par contre, j'en avais une légère idée, mais je la laissais au stade d'ébauche, espérant de tout cœur me tromper. Toujours est il que chaque jour, depuis ce qu'il me semblait une éternité, je déambulais au pied de celle-ci, martelant la place de mon pas régulier, à l’affût du moindre problème. Mais il ne s'était jamais rien produit. A mon plus grand malheur, ou mon plus grand bonheur, je ne saurais même pas le dire. Je me sentais inutile, faible, et perdu. Parce que finalement, je ne servais à rien dans cette société, si ce n'est à perdre mon temps. Mais je n'y pouvais rien. Alors je restais la, chaque jour, -ou chaque nuit, qui sait, le ciel ne changeait pas-, dévisageant la foule en quête d'un amusement, ou me laissant émerveiller par la magie qui habitait la tour, transformant ces boules de lumière en corps.

A peine y pensais-je qu'une âme sortait de la tour, volant comme en apesanteur et descendant lentement mais inévitablement sur le sol, où elle pourrait reprendre sa forme d'origine. Celle de sa vie sur terre. Je la regardais descendre, toujours autant émerveillé par cette lumière enchanteresse et pure qui émanait, miracle qu'accomplissait des dizaines, voire des centaines de fois la tour chaque jour. Peut être même des milliers ? Oui, surement, après tout, combien de personnes mourraient par jour dans le monde ? Je ne le savais pas. Une fois à hauteur du sol, elle commença à changer de forme progressivement, pour finir par incarner l'image d'un jeune asiatique de sensiblement mon âge. A peine le changement eut-il lieu que la personne en question changeait son expression sereine d'origine en un fouillis d'émotions. Je ne pu m'empêcher de me souvenir l'état dans lequel j'étais à mon arrivé. J'étais complètement paniqué et perdu. J'avais peur, et je ne comprenais rien, si ce n'est une chose : j'étais mort, et je ne pourrais plus jamais rien y faire. Un sourire triste barra mes lèvres tandis que je me remémorais mes premiers jours où j'avais erré comme une âme en peine, dans l'espoir vint de retrouver quelqu'un que je n'avais vu depuis bien trop longtemps, en vain. Soupirant, je chassais ce souvenir et reprenais une expression plus joviale, m'avançant vers ce jeune homme qui semblait essayer de prendre ses repères. 

"Tu vas bien ?"


Je savais ma question stupide en vue des circonstances, mais je ne pouvais m'empêcher de la poser. Après tout, elle ne faisait de mal à personne, non ? Et puis il fallait bien entamer la conversation d'une quelconque façon. Cet asiatique avait surement une tonne de questions à poser, et je me ferais une joie d'y répondre, bien que celles-ci ne soient pas toujours bonnes à entendre. De toute façon, à quoi servait-il de mentir ? C'était la dure réalité, et aussi forte soit notre volonté, nous ne pouvions changer cette destinée. Lui souriant de façon bienveillante, j'ajoutais de la façon la plus accueillante qu'il m'était donné de faire :

"Bienvenue dans les Limbes !"


[Désolé pour cette réponse courte, et pour le temps que j'ai mis, promis, je ferais bien mieux la prochaine fois. T.T]